Jeudi 14 avril à 18 heures, j’arrive seule au Musée d’Art Contemporain, me demandant bien ce qui m’attend ; heureusement, je n’ai proposé à personne de m’accompagner ! A la caisse, le jeune homme me dit : « ça a déjà commencé. » Alors, je me précipite au deuxième étage, regrettant déjà d’avoir manqué quelque chose. Nikhil Chopra a déjà commencé à dormir dans un décor proche de celui de la Serpentine Galerie à Londres – où il a déjà performé du 10 au 12 décembre 2008 -Sur chaque mur de la salle, une immense toile est punaisée ; un paysage y est dessiné à grande échelle, très soigné. A Lyon l’artiste a gardé la représentation du Port d’Oslo que vous apercevez à gauche ; sur une autre cloison, une villa britannique et son jardin sont dessinés, puis, sur la troisième, le lac de Palabru en Ysère. La confrontation de ces lieux, très différents, est déconcertante, mais la finesse du trait, la monochromie harmonisent l’ensemble. Nikhil Chopra dort dans la rue, ou dans une sorte de camping rustique ; peut-être en Inde, contrairement aux destinations suggérées sur les murs ! Au sol, des gamelles, des coffres, des vêtements sont dispersés. Il dort encore, étalé à même le sol, vêtu d’une chemise large et d’un pantalon traditionnel indien ; ça n’en finit pas… Puis il s’éveille, s’étire, s’assied derrière la table, applique de la mousse sur son visage avec un blaireau, se rase lentement…. ça dure un temps fou ! Impatiente, je vais revoir d’autres oeuvres ; quand je reviens, il a presque achevé le rasage et se lave la figure, puis il se maquille interminablement, enduit sont visage de blanc – référence au type humain occidental -, surligne son regard d’un trait noir, met du mascara sur ses cils, du rouge à lèvre. Alors, il enlève lentement sa chemise – de nuit – et se lave la poitrine.
N’ayant pas pris de photo car un photographe professionnel était présent, je vous présente Nikhil Chopra sur la vidéo d’une autre performance qui a eu lieu au MCA de Chicago Il est beau, il le sait. Il s’exhibe. Ne se prend-il pas lui même pour une oeuvre d’art ?
Il met une chemise vert pâle au col et aux manchettes amidonnées, la boutonne lentement, puis enlève son pantalon traditionnel, enfile une pantalon de lainage très british et ajuste les bretelles. Il retire ses vieilles schaussures et met des bottes de cuir, endosse une redingotte, noue un foulard façon Lavalière autour de son cou… C’est interminable ! les quelques spectateurs vont et viennent, comme moi. Puis il ajuste une perruque – raie au milieu, petit chignon sur la nuque – et pose un chapeau haut de forme sur sa tête. Il est méconnaissable ! Il se tient au garde-à-vous, sort lentement de la salle et revient quelques temps après pour se faire applaudir. Il est 19 heures 30.
Il faut encore attendre jusqu’à 20 heures la conférence de l’artiste et du commissaire Gunnar B. Kvaran pour avoir des explications. Dommage, je ne peux pas rester. Toute personne pouvant me transmettre un petit compte-rendu de la conf. est bienvenue ! quelle est la signification de cet enchaînement de gestes quotidiens, étiré dans le temps, transformé en rituel ? La lenteur des gestes fait-elle référence à la longue colonisation de l’Inde par les Britaniques ? L‘Inde est à présent dans une ère post-colonniale où traditions indienne et britannique ont marqué la société.
J’apprécie le talent de dessinateur, de comédien et de mime de Nikhil Chopra. Le but de sa performance est sûrement de nous déranger. Comme trop souvent dans l’art contemporain le discours de l’artiste est nécessaire pour nous convaincre de l’intérêt de l’oeuvre.
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